Français hors de France !
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Le français est une très belle langue. J’en suis tombé amoureux à l’âge de huit ans, et c’était la seule matière à l’école où j’a réussi à passer un examen avant mon expulsion ignominieuse à 15 ans pour avoir fumé dans les gogues.
Ironie du sort, c’était ma tendance à traîner avec d’autres voyous lors de mon échange scolaire à Rouen à 14 ans qui m’a donné le coup de pouce dont j’avais besoin. Pendant que nous nous cachions dans des coins obscurs pour fumer nos clopes et jacter en français, mes co-écoliers de souche allaient deux par deux, le nez en l’air, refusant jusqu’à admettre que, peut-être, la façon britannique de prononcer le latin pouvait sonner bizarre à l’oreille délicate française (PS : c’est vrai).
À 18 ans, je quitte mes bières brumes pour les pastagas du Midi. Arrivé à Antibes en mi-février 1973, je suis déçu de ne pas trouver un seul des innombrables emplois de plage que j’étais convaincu m’attendaient. Mais voilà qui surgit l’un des aspects merveilleux en apprentissage des langues : ce n’est pas facile. Et, peut-être plus important encore, se jeter dans le grand bain vous oblige à apprendre rapidement. Quand quasiment tout devient une nécessité – que ce soit de trouver un endroit où dormir, un travail, de la nourriture, ou même une partie de plaisir – il faut se débrouiller, et il faut se le magner.
En même temps, ce n’est pas du tout la méthode que je recommande pour apprendre une langue. Dieu sait le nombre de personnes qui sont simplement « allé vivre dans le pays » et qui, 30 ans plus tard, bredouillent toujours un affreux mélange de gargarismes à vous frotter le polystyrène contre les tympans. Un jeune de 18 ans, et encore moins un trentenaire ou un quadragénaire, n’a pas de parents poupoulaïsants qui lui répètent des mots ad nauseam, il ne passe pas année après année à entendre la langue sous toutes ses coutures, dans tous ses accents, avec ses variations, intonations et abréviations, puis des années encore à faire de sa bouche le plus précis des systèmes musculaires capables de verbaliser instantanément une multitude de sons d’une subtilité exquise et significative.
Il faut bosser. Certains s’ennuient, certes, mais les conjugaisons doivent être apprises. Il est des langues faciles. Le suédois, par exemple. Avec une douzaine de mots par verbe, dont une demi-douzaine de pronoms personnels communs à tout verbe, vous pouvez exprimer quel que soit la personne, temps ou mode, actif ou passif, que vous voulez. Ce n’est pas le cas du français avec sa quarantaine de permutations dont, statistiquement, aucun francophone n’est capable de restituer correctement. Il est vrai que l’anglais n’a qu’une orthographe barbare datant encore de l’époque où elle reflétait plus ou moins le langage courant, mais la seule et très petite barrière à les apprendre sont certains participes passés :
- dive – dove
- stink – stunk (ou est-ce stank ?)
- think – thought
- shear – shorn etc.
mais c’est tout !
Voilà pour les verbes. En français, il y a bien pire ! Prenons quelques exemples :
- le genre (le con, la queue)
- l’orthographe (facile, facilité ; imbécile, imbécillité ; tranquille, tranquillité...)
- les chiffres !
Les anglophones se rappellent leurs contes de fées commençant par des « Four score and seven years ago… » C’est pittoresque. Ça donne un petit coup de nostalgie chaleureuse. Mais ce n’est pas très utile pour les maths. Et alors que la France jouissait des évidents et très pratiques septante, huitante et nonante jusqu’au XIVe siècle, elle les a abandonnés pour les vicelards vigésimaux soixante-dix, quatre-vingts et quatre-vingt-dix ! Pourquoi ?
Comme je l’explique dans mon livre, on l’a fait exprès, en grande partie, pour garder la plèbe à sa place.
Actuellement disponible uniquement en français, Français hors de France ! examine la série de manigances politiques qui ont transformé le français en une langue de et pour l’élite. Il passe en revue les diverses manipulations qui l’ont transformé d’une langue comme une autre, parfaitement capable d’être utilisée par tout un chacun de ses locuteurs, à une langue si compliquée qu’elle s’est exclue elle-même du palmarès des principales langues du monde et s’est détrônée comme langue internationale de la diplomatie.
Finis son rôle de langue littéraire par excellence, finis ceux de la philosophie, de la science et même de la culture. C’est le Sunset Boulevard des grandes langues du monde.